Le tribunal administratif de Toulouse a annulé le plan local d’urbanisme intercommunal – habitat (PLUiH), voté en avril 2019, de Toulouse Métropole. L’élaboration de ce document visait, en premier lieu, à remplacer le PLU (plan local d’urbanisme) des 37 communes. Le tribunal a jugé le PLUiH de Toulouse trop gourmand en espaces naturels et agricoles. Plusieurs contestations à l’encontre du document sont arrivées auprès du tribunal administratif. Sur les 41 requêtes déposées, le rapporteur public a demandé l’annulation du plan local d’urbanisme en tenant compte des arguments avancés pour 12 requêtes. Rappelons que ce document administratif fixe toutes les règles d’habitat et de construction de toutes les communes et des 46 000 hectares de la métropole, à l’instar de l’obtention des permis de construire. Le jugement ne prend pas effet immédiatement, le but étant de permettre aux différentes parties concernées par cette situation de discuter sur une éventuelle modulation de l’annulation dans les prochaines semaines. Toutefois, les répercussions sur l’environnement et sur l’habitat à Toulouse après cette annulation peuvent se faire ressentir, même si la décision n’est pas encore effective.
Vue aérienne de Toulouse et de la basilique Saint-Sernin © saiko3p – Shutterstock
Qu’est-ce-que le PLUi-H ?
Comme nous l’avons survolé un peu plus tôt, le plan local d’urbanisme intercommunal – habitat est un document qui fixe les principales orientations d’habitat et d’aménagement du territoire ainsi que les règles d’occupation et d’utilisation du sol. Les plans locaux d’urbanisme ainsi que les plans d’occupation des sols n’existent plus désormais. Ce plan sert de référence pour l’instruction de toutes les autorisations d’urbanisme, tels que la déclaration préalable et le permis de construire, et concerne aussi bien les entreprises que les particuliers ou les administrations. Le PLUiH de Toulouse contient 3 600 pages et devait permettre au maire et président de l’intercommunauté, Jean-Luc Moudenc, de concrétiser le concept de « densité modérée ». La stratégie pour laquelle il a opté visait à limiter la consommation du foncier, d’une part, et d’autre part de reconstruire la ville, tout en bâtissant 7 000 logements neufs chaque année afin de répondre efficacement à une croissance démographique importante, mais répartie de manière équitable entre les différentes couronnes et le centre-ville.
Pourquoi le PLUi-H a été annulé ?
Le mardi 30 mars 2021, le tribunal administratif a rendu sa décision concernant l’approbation du PLUiH de la métropole toulousaine. Le tribunal a justifié l’annulation du Plan local d’urbanisme par différentes raisons. Il a notamment jugé les auteurs du plan sur deux points : la surestimation de la consommation d’espaces dans le passé et la surévaluation des besoins fonciers qui résultent des prévisions démographiques et économiques. Concernant l’erreur sur l’appréciation de la consommation d’espaces, il est à noter qu’une collectivité est en droit de continuer à s’étaler, mais à l’unique condition que la politique de densification qui a été établie sur les dix prochaines années soit inférieure à celle qui a été conduite lors des 10 années précédentes. Le tribunal administratif de Toulouse précise que l’objectif de consommation d’espace mentionné et sur lequel se fondait le PLUiH n’induisait aucunement une modération effective de la consommation, mais plutôt « une hausse du rythme de prélèvement d’espaces naturels, agricoles et forestiers », si l’on se réfère à la décennie antérieure.
Vue aérienne de la médiathèque José Cabanis à Toulouse © Altitude Drone – Shutterstock
Est-ce qu’une modulation de l’annulation est envisageable ?
Toulouse Métropole avait demandé lors de l’audience publique que dans le cas d’une annulation, celle-ci pourrait être modulée dans le temps. La requête a été prise en compte et le tribunal a pris la décision de surseoir à statuer sur une date d’effet afin que les parties puissent débattre sur l’intérêt de moduler ou non dans le temps les effets de l’annulation. Le tribunal a aussi censuré les OAP (orientations d’aménagement et d’orientation) qui sont relatives aux zones de « La Ramée-Marquisat », à Tournefeuille, et du « Parc Boyer », situé à Castelginest. Une nouvelle audience publique est prévue pour la fin du mois d’avril et la décision finale sera rendue à ce moment-là. En principe, l’annulation d’un acte administratif est bien rétroactive. Concrètement, Toulouse Métropole dispose aujourd’hui d’un sursis de 15 jours pour présenter des éléments nouveaux. En effet, si le tribunal considère que l’annulation peut entraîner de lourdes conséquences, il peut décider qu’elle ne prendra effet qu’à une date ultérieure, d’où la décision du juge lors de la dernière audience. Une éventuelle modulation pourrait permettre à Toulouse Métropole d’éviter l’annulation des nombreux permis de construire qui ont déjà été accordés sur la base du plan d’urbanisme intercommunal – habitat (PLUiH), et d’amender le plan pour qu’il soit parfaitement conforme à la loi. Point important à souligner : si le PLUiH à Toulouse Métropole est annulé, la collectivité sera obligée de se tourner vers les règles d’urbanismes qui s’appliquaient auparavant et perdrait de ce fait 3 années.
Quelles sont les conséquences de l’annulation du PLUiH de Toulouse ?
Les promoteurs immobiliers et les professionnels qui travaillent autour de ce domaine se posent tous la même question : quelles sont les conséquences de cette annulation ? Techniquement, pour l’instant, comme les effets d’annulation sont transitoirement différés, il n’y a pas encore de conséquence d’après l’avocat toulousain, spécialisé dans l’urbanisme, Jean Courrech. Toutefois, ce sursis est de courte durée, et l’immobilier neuf à Toulouse pourrait être impacté par la décision qui sera prise.
Dans le cas où le tribunal venait à décider de l’annulation immédiate du PLUiH de Toulouse, il disparaîtrait en quelques mois et l’on devrait alors revenir aux PLU antérieurs. Plusieurs projets urbains de grande importance pourront être remis en cause, causant automatiquement un ralentissement de la délivrance des permis de construire. Par ailleurs, toujours dans cette suite logique, l’activité de tous les acteurs de la filière des travaux publics et du bâtiment subira un blocage immédiat. Le plan local d’urbanisme intercommunal de Toulouse donne des indications et des orientations sur la production des 7 000 logements neufs prévus par Jean-Luc Moudenc. Ce paramètre signifie que la production des logements sociaux pourrait être également sévèrement touchée par cette annulation, entraînant par la même occasion des questionnements sur les solutions possibles sur le problème de logement dû à la croissance démographique au sein de l’agglomération toulousaine. Même si le secteur immobilier ne connaît pas encore de forte crise, les offres de logements neufs à Toulouse pourraient être en berne à cause de cette annulation, mais aussi des élections municipales et de la crise sanitaire.
Un programme immobilier neuf © vizual3d – Shutterstock
Récemment, le président de la fédération des promoteurs immobiliers Occitanie Toulouse Métropole a déclaré qu’un retour aux anciens PLU pour toutes les communes va mener à une modification de la constructibilité sur certains terrains, à la baisse ou à la hausse, et à une adaptation et une révision des permis de construire qui n’ont pas encore été délivrés pour certains projets. Le besoin en logement reste intact dans la Ville Rose et cela, les collectivités l’ont bien compris. C’est la raison pour laquelle les promoteurs immobiliers gardent espoir concernant la poursuite des opérations de délivrance des permis de construire. Au cours des prochains mois, les modalités d’application seront beaucoup plus claires, mais en attendant, les promoteurs continuent à travailler sur leurs projets respectifs. Pour le moment, il n’y a encore rien d’inquiétant, mais la décision prise pourrait donner un coup d’arrêt important pour les promotions immobilières de la ville.