Le centre-ville de Toulouse va connaître des changements majeurs en 2025 avec l’entrée en vigueur du Plan de Sauvegarde et de Mise en Valeur (PSMV).Ce document d'urbanisme, couvrant 256 hectares incluant l’intérieur des anciens remparts et le faubourg de Saint-Cyprien, vise à protéger et valoriser le patrimoine tout en planifiant l’évolution urbaine.
Avec plus de 12 700 immeubles concernés, ce plan régira les travaux sur les bâtiments historiques et modernes, en imposant de nouvelles règles strictes, tout en ouvrant la voie à des avantages fiscaux, comme la loi Malraux. Quels impacts sur l’immobilier à Toulouse ?
Qu’est-ce que le PSMV ?
Créé par André Malraux, ancien ministre de la Culture, le Plan de Sauvegarde et de Mise en Valeur (PSMV) est un document de planification visant à assurer la sauvegarde et la mise en valeur des sites patrimoniaux. Ce plan fait partie des deux outils dédiés à la préservation et à la mise en valeur des sites patrimoniaux remarquables (SPR).
Un PSMV peut être instauré sur une portion ou sur la totalité d’un site patrimonial remarquable. Si une partie du site n’est pas incluse dans le PSMV, elle est alors régie par un autre dispositif, le plan de valorisation de l’architecture du patrimoine (PVAP).
Sur le périmètre qu’il englobe, le PSMV remplace le Plan Local d’Urbanisme (PLU). Il inclut également un règlement et peut intégrer des orientations d’aménagement et de programmation (OAP) concernant des bâtiments existants, des terrains non bâtis ou des ensembles immobiliers, accompagnées, le cas échéant, de supports graphiques.
Les principaux objectifs du PSMV
En tant qu’outil de gestion du patrimoine, cet outil vise plusieurs objectifs outre la préservation du patrimoine :
- Comprendre et valoriser un patrimoine riche et dynamique.
- Poursuivre la redynamisation de l’habitat et des activités au cœur de la ville.
- Encourager la mixité sociale et résidentielle, la diversité des usages et des mobilités douces.
- Prendre en compte les défis de la transition énergétique et de la sobriété dans le cadre historique.
- Coordonner le projet urbain à l’échelle des différents territoires.
Le périmètre du PSMV à Toulouse
Dès 2025, 256 hectares du centre-ville de Toulouse sera concerné par le PSMV, comprenant l’intérieur des anciens remparts et le faubourg de Saint-Cyprien.
Ce sont 12 700 immeubles qui concernés selon les données fournies par la Ville de Toulouse ainsi 155 monuments historiques (dont deux tiers appartiennent à des propriétaires privés), deux sites inscrits au patrimoine de l’Unesco, dont la basilique Saint-Sernin et l’Hôtel-Dieu et 16 sites classés.
Pour ces immeubles, cela signifie qu’ils pourront être soumis à une expertise structurelle en cas de travaux intérieurs ou dans les parties communes. C’est en tout cas l’une des obligations prévues par le PSMV qu’a présenté Jean-Luc Moudenc, le 25 mars 2024.
6 542 sites visités à Toulouse
Fruit d’un travail opéré il y a plus de dix ans, la réalisation de ce règlement a permis de mieux cerner les caractéristiques, l’état et la richesse patrimoniale du centre-ville toulousain. Cette lourde étude a engendré 6 542 visites de sites.
Ces dernières ont permis de comptabiliser 28,9% des immeubles afin de les classer pour être protégés, aussi bien pour leur intérieur que leur extérieur. 27,7 % des immeubles doivent être préservés pour leur apparence extérieure, tandis que des aménagements sont permis à l'intérieur.
En revanche, 41 % des immeubles pourront subir des transformations architecturales, telles que des surélévations ou autres modifications structurelles.
Règles et contraintes du PSMV
Le Plan de Sauvegarde et de Mise en Valeur établit un cadre règlementaire précis afin de préserver le patrimoine historique de la ville. Ces règles concernent les travaux qui touchent à l’architecture extérieure et les aménagements intérieurs des bâtiments afin de concilier conservation et modernisation.
Le futur PSMV instaure des règles précises pour chaque parcelle et énoncera immeuble par immeuble, des prescriptions sur les extérieurs (toitures, façades, cours…) et les intérieurs (appartements, cages d’escalier, boiseries…) pour les parties communes et privatives
selon Toulouse Métropole.
Quelles conséquences pour les toulousains ?
Jean-Luc Moudenc a souligné que le PSMV entraînerait des conséquences pour les habitants du centre-ville, notamment la création d’un droit opposable
mais aussi d’un droit de regard
par la collectivité.
Cela se traduira par un dépôt obligatoire de permis de construire pour les parties communes et privatives des immeubles
. Les propriétaires seront tenus d’y réaliser des expertises structurelles.
Des diagnostics structurels imposés
Afin d’inciter les propriétaires à réaliser des diagnostics structurels, le premier magistrat souhaite que la mairie « aille plus loin dans l’information », notamment via des courriers de sensibilisation ciblés pour les agents immobiliers, les notaires et autres locataires.
La collectivité souhaite aussi se rapprocher de l’Adil (Agence départementale d’information pour le logement) pour renforcer le conseil sur les aides existantes
.
La mairie indique également avoir imposé un diagnostic structurel pour tous les immeubles qu’elle subventionne pour des ravalements de façade.
Des opportunités de défiscalisation
Les propriétaires pourront en contrepartie bénéficier d’une réduction d’impôts en échange de la restauration complète des immeubles grâce à la loi Malraux.
Le surcoût prévu d’un immeuble historique que l’on rénove sera déductible des impôts en application de cette loi ancienne à laquelle les propriétaires toulousains n’avaient pas accès
explique Jean-Luc Moudenc.
La loi Malraux permet aux contribuables de bénéficier d’une réduction d’impôt basée sur 30% des frais de restauration engagés pour des immeubles localisés dans un Site Patrimonial Remarquable. Le montant pris en compte pour cette réduction est plafonné à 400 000 sur une période de quatre ans consécutifs.
Les prochaines étapes avant l’adoption du PSMV à Toulouse
Le PSVM doit encore être soumis à la Commission nationale du patrimoine et de l’architecture (CNPA). Une enquête publique spécifique sera menée du 4 novembre au 6 décembre en Conseil municipal métropolitain afin de tenir compte des Personnes publiques associées, des commissaires enquêteurs et des éventuels retours de la CNPA
explique Jean-Luc Moudenc.
Renforcer la cartographie des immeubles
Le maire a annoncé de nouvelles mesures prises par la mairie afin de mieux cartographier des immeubles menaçants
. L’objectif est aussi d’acquérir un logiciel de repérage et de surveillance par satellite
pour les bâtiments en ruine.
La mairie souhaite également former les agents qui interviennent sur la voie publique pour qu’ils puissent devenir des lanceurs d’alerte.
La Métropole a pour projet de charger ses satellites Oppidea et Europolia afin de mener une étude d’intervention sur la réhabilitation du bâti ancien en centre-ville
. Cette étude inclura des recommandations spécifiques, précisant quels îlots nécessitent une attention particulière ainsi que les ressources à mobiliser pour leur rénovation.
Créer un observatoire du bâti toulousain
p>Pour rassembler l’ensemble des données sur la situation des immeubles de la ville, Jean-Luc Moudenc a annoncé vouloir créer un observatoire du bâti toulousain.
La mairie prévoit également de collaborer avec le Centre scientifique et technique du bâtiment (CSTB), un organisme public spécialisé, déjà sollicité à Bordeaux et à Marseille après de récents effondrements d’immeubles.
Elle souhaite en outre travailler avec le CSTB pour bénéficier d’expertises sur le périmètre de sécurité établi
ainsi que sur la gestion complexe des réintégrations
. À moyen terme, la municipalité de mener une action préventive plus large, ciblant les immeubles susceptibles de présenter des signes de fragilité.
Anticiper la fragilité des immeubles
Le PSMV doit permettre de mieux accompagner les évolutions du bâti et ainsi éviter d’autres effondrements comme celui de la rue Saint-Rome. L’objectif est aussi de pouvoir analyser l’offre commerciale tout en évaluant les évolutions possibles.
Il est aussi question de développer plus d’espaces de nature en ville, tout en tenant compte des contraintes liées à un environnement urbain dense et chargé d’histoire. Ce sont 1 500 arbres et 15 hectares à protéger qui ont d’ailleurs été recensés par le PSMV à Toulouse.
Des réserves du côté de l’opposition
Isabelle Hardy, conseillère municipale d'opposition, reconnaît que le plan de sauvegarde pour le centre-ville de Toulouse est une initiative positive et nécessaire.
Cependant, elle exprime des préoccupations, notamment sur l'urgence de contraindre les propriétaires à rénover les bâtiments : Quand on voit toutes les urgences qu’il y a à traiter, il faut mettre en œuvre des mesures correctives d’urgence, pour contraindre les propriétaires à rénover
et sur les moyens humains et financiers alloués à ce projet.
Selon elle, sans ressources suffisantes, il sera difficile de mettre en œuvre le plan à grande échelle. Elle s'inquiète également du sort des nombreux bâtiments anciens situés en dehors du périmètre couvert par le plan : On est sur une ville moyenâgeuse, ancienne, et nous avons énormément de bâtiments anciens en dehors de ce périmètre. Il y a eu l’exemple de l’immeuble fragilisé place Belfort, mais il y en a aussi dans le quartier des Chalets, que va-t-il se passer pour eux ?
.