Il y a quelques semaines, la commission des affaires économiques du Sénat a décidé de supprimer le questionnaire santé pour les prêts immobiliers. Prochainement, ceux qui souhaitent se lancer dans un projet d’achat d’un logement neuf à Toulouse n’auront plus à passer par ce dispositif. Ce dernier a été jugé discriminatoire pour les personnes atteintes de maladies chroniques ou de longues pathologies.
Le nouveau dispositif ouvrira de nouvelles portes à plusieurs personnes
La présidente de la commission des affaires économiques, la sénatrice LR Sophie Primas, a déclaré en janvier dernier qu’en prenant la décision de supprimer le questionnaire santé, les membres de la commission avaient « mis le pied dans la porte ». La disparition du questionnaire médical auquel les futurs emprunteurs sont soumis permettra un accès plus simple, plus transparent et surtout plus juste au marché de l’assurance emprunteur. Par le biais de cette suppression, les sénateurs ont bien l’intention de mettre un frein aux discriminations que subissent les personnes malades dans le cadre d’une demande de prêt.
Qu’est-ce que le questionnaire de santé ?
Le questionnaire de santé doit être rempli par les futurs emprunteurs qui doivent souscrire à une assurance de prêt. Les résultats permettent à l’organisme assureur de connaître en détail l’état de santé du demandeur et de décider ensuite s’il accepte ou non de le couvrir. Le questionnaire devait dresser l’historique des antécédents médicaux de chaque personne. Les banques pouvaient ensuite mettre en place une tarification du risque, ce qui était particulièrement défavorable aux personnes souffrant de maladies chroniques dans la majorité des cas.
Pour augmenter leurs chances d’obtenir un prêt dans les meilleures conditions, certaines personnes ont préféré masquer quelques éléments sur leur état de santé. Cependant, les sanctions étaient assez lourdes dans le cas d’une fausse déclaration, intentionnelle ou non. Selon le cas, il pouvait s’agir d’une résiliation du contrat ou d’une annulation rétroactive de celui-ci, d’une plainte pour fraude à l’assurance, d’une prime d’assurance recalculée à la hausse et dans les cas les plus extrêmes, le coupable était passible d’une peine de prison de 5 ans et d’une amende de 375 000 €.
Avec le dispositif actuel, dans le cadre de la convention AERAS, un droit à l’oubli est prévu. Il sera destiné aux personnes atteintes de cancer. Elles seront en droit de ne plus le déclarer après un certain délai suivant la fin de leur traitement. Le texte prévoit un raccourcissement du délai à 5 ans ainsi que la possibilité de résilier l’assurance n’importe quand.
Un dernier vote au Sénat le 17 février
questionnaire de santé - un marteau de juge posé sur un texte de lois © Valerii Evlakhov – Shutterstock
La proposition de loi sur la suppression du questionnaire médical pour le crédit immobilier a été actée lors de la réunion en commission mixte paritaire (CMP) du jeudi 3 février dernier. Cette suppression sera effective pour tous les prêts bancaires inférieurs à 200 000 € par personne (400 000 € pour ceux qui empruntent à deux), et dont le terme intervient avant les 60 ans de l’emprunteur. Au départ, la mesure a été votée par les sénateurs. Pour qu’elle soit adoptée définitivement, elle devra être votée par l’Assemblée nationale et au Sénat le 17 février.
Sophie Primas a révélé que la modification devrait être validée par l’Assemblée nationale, qui est aujourd’hui entre les mains du camp présidentiel. Elle a ajouté qu’avec l’élection qui approche, il serait improbable que la majorité présidentielle décide de revenir en arrière.
Une étape historique franchie
Il était difficile d’imaginer que les députés allaient pouvoir tomber sur un accord après des débats assez houleux au Sénat. Le rapporteur de la CMP et sénateur Les Républicains, Daniel Gremillet, s’est réjoui en affirmant que tous leurs amendements avaient été retenus. La décision prise aura de vraies conséquences selon lui. On compte aujourd’hui près de 700 000 personnes par an qui sont concernées par le questionnaire de santé. Ce qui représente 50 % de ceux qui souhaitent souscrire un prêt bancaire.
L’association Les Séropotes, accompagnant les personnes LGBT + contrôlées positives au VIH, avait indiqué dans un communiqué qu’il s’agit ici d’un grand pas en avant pour ceux qui sont touchés par la maladie. Toutefois, il est important de préciser que le montant est encore peu élevé, notamment pour les malades du VIH. Le délégué de l’association à l’accès aux droits et aux soins, Bruno Lamothe, avait attiré l’attention des parlementaires sur ce point et a déclaré que l’association sera attentive à la réévaluation de ce montant.
Le questionnaire peut être maintenu dans quelques cas de figure
C’est un point sur lequel il faut insister : le questionnaire de santé pour un crédit immobilier ne disparaîtra pas complètement. En effet, pour les prêts de plus de 200 000 € par personne, le questionnaire s’appliquera encore. Ce sera la même chose pour les emprunteurs dont les prêts arrivent à échéance à plus de 65 ans. Le rapporteur Daniel Gremillet a précisé qu’il a parfaitement conscience que ce plafond n’est pas encore satisfaisant, surtout pour les grandes métropoles et la région parisienne. De ce fait, il a déclaré qu’il allait proposer un amendement pour qu’il soit possible d’aller un peu plus loin. Actuellement, la moyenne en France est de 185 000 €.
En ce qui concerne l’échéance de 65 ans de l’emprunteur, une série d’amendements est prévue en vue de l’obtention d’un droit à l’oubli plus court. Pour le moment, la durée moyenne de remboursement pour un crédit immobilier est de 20 ans. Il s’agit ici des cas pour la grosse majorité des emprunteurs qui sont âgés de plus de 45 ans au moment de la demande. Dans la nouvelle version du dispositif, d’autres pathologies pourraient être incluses dans le droit à l’oubli, comme quelques maladies cardio-vasculaires ou le diabète, par exemple.
Vers une hausse probable des coûts des assurances ?
questionnaire de santé - un couple âgé en train de compléter des documents © wavebreakmedia – Shutterstock
Avec la suppression du questionnaire de santé pour un crédit immobilier, quelques inquiétudes se font ressentir de la part des assureurs. Le directeur général de France Assureurs, Franck Le Vallois, a déclaré que cette suppression risque d’être défavorable au pouvoir d’achat des Français, contrairement aux apparences. Il est très difficile, poursuit-il, d’assurer sans connaître les risques. Les assureurs pourraient donc opter pour des approches beaucoup plus prudentes, ce qui risque de mener graduellement vers un rehaussement du coût de l’assurance. Le président du courtier April, également porte-parole de l’APCADE (Association pour la promotion de la concurrence en assurance des emprunteurs), Eric Maumy, a noté que le marché actuel devra retravailler sur de nouveaux modèles de tarification. Dans quelque temps, les critères liés à l’âge pourraient être plus importants. Cependant, les consommateurs sont les grands gagnants de cette décision, conclut-il.
Raccourcissement du droit à l’oubli
Comme nous l’avons survolé un peu plus tôt, le droit à l’oubli sera désormais de 5 ans, contre 10 ans auparavant, pour l’hépatite C et les pathologies cancéreuses. Cela permettra aux malades d’avoir une assurance au meilleur prix pour leur emprunt puisqu’ils ne devront plus faire état de leur ancienne maladie. Cette mesure ne plaît pas aux assureurs et aux banquiers. Ces derniers ont pour principal objectif de maîtriser les risques au maximum. La FBF (Fédération Bancaire Française) a tenu à s’exprimer sur le sujet en déclarant que la profession bancaire est principalement attachée à « un modèle mutualisé d’assurance pour tous et à l’accès à un crédit immobilier sécurisé ». Dans le cadre qui va être adopté, la profession appelle au maintien de ces objectifs.