90 000. C’est le nombre d’habitants attendus à Toulouse Métropole d’ici 2035. Bien que cette croissance soit positive sur le plan économique, elle pose d’importants défis en termes d’urbanisation et de préservation des espaces naturels.
Afin de répondre à ces défis, un nouveau Plan Local d'Urbanisme intercommunal (PLUI-H) est en préparation. Bien que validé par les élus le 20 juin dernier, ce plan suscite des divergences et ne fait pas l'unanimité. Mais comment concilier la construction de logements neufs à Toulouse tout en luttant contre l’artificialisation des sols ?
La rédaction revient sur les éléments clés du document et les enjeux de la métropole pour les années à venir.
Un nouveau PLUI-H pour la période 2025-2035 à Toulouse Métropole
Le Plan Local d'Urbanisme intercommunal, qui fait également office de Programme Local de l'Habitat (PLUi-H), est un document de planification stratégique couvrant l'ensemble des 37 communes de la Métropole.
Celui-ci vise à fixer les grandes orientations pour l’aménagement du territoire, notamment à travers l’habitat, les règles d’occupation et d’utilisation des sols, les zones à préserver et les règles applicables dans les zones constructibles. Il servira de référence en matière d’autorisations d’urbanisme (permis de construire, déclaration préalable, etc.).
À la suite de l’annulation du précédent PLUI-H par la justice, un nouveau plan d’urbanisme était en préparation depuis trois ans en collaboration avec 37 maires, avant d’être arrêté le 20 juin 2024. D’ici l’approbation finale prévue pour fin 2025, la procédure d’élaboration est toujours en cours, organisée en deux étapes essentielles :
- De juillet à décembre 2024 : les partenaires institutionnels sont invités à s’exprimer sur le projet.
- Au premier trimestre 2025 : une enquête publique sera dédiée à l’expression du public, suite à la concertation clôturée le 31 mars dernier. Ce temps sera l’occasion pour les acteurs concernés de poser des questions et de formuler d’éventuelles observations auprès de la Commission d’enquête indépendante.
Quels sont les objectifs visés par le nouveau PLUI-H ?
Outre l’urgence en matière de logements et d’emplois, le nouveau plan doit également relever un défi majeur : concilier développement urbain et protection des espaces naturels. Pour ce faire, le plan fixe deux objectifs précis :
- Réduire de 50 % la consommation d’espaces naturels par rapport à la période précédente.
- Protéger 95 % des espaces naturels, agricoles et forestiers (ENAF), assurant ainsi la préservation de l’ensemble des terres non urbanisées actuelles.
7 400 logements attendus par an
La métropole entend accueillir plus de 90 000 habitants sur dix ans, soit 9 000 habitants chaque année en moyenne, en plus d’accueillir 51 000 emplois sur la période. Annette Laigneau, Chargée d’urbanisme et des projets urbains rappelle que l’objectif est ”d’accueillir 9 000 habitants par an supplémentaires tout en protégeant les espaces agricoles et naturels”
.
Afin de répondre aux besoins de densification, le futur plan d’urbanisme fixe un objectif de construction annuelle de 7 400 logements en moyenne, répartis comme suit :
- 72 % des nouvelles constructions se concentreront à Toulouse, Colomiers et Blagnac, désignés comme les principaux pôles urbains de la Métropole. Par ailleurs, l’accueil des emplois se fera principalement dans les zones d’activités déjà existantes.
- 6 % des logements seront construits à Balma et Tournefeuille
- 14 % seront répartis dans 13 communes dites "relais" : Cugnaux, Saint-Orens, L’Union, Saint-Jean, Aucamville, Pibrac , Cornebarrieu, Beauzelle, Saint-Jory, Quint-Fonsegrives, Fenouillet et Montrabé.
- Enfin, 8 % des habitations se développeront dans 19 autres communes, dont Castelginest, Launaguet, Aussonne, Saint-Alban, Bruguières, et plusieurs autres localités de la périphérie toulousaine.
Un parc de logements revalorisé en milieu urbain
Pour atteindre l’ensemble de ces objectifs, Toulouse Métropole s’engage à produire des logements majoritairement en milieu urbain. La preuve en est avec les nombreux projets d’écoquartiers de ces dernières années comme Montaudran, Guillaumet ou encore la Cartoucherie.
Le nouveau PLUI-H vise 28 000 logements neufs construits autour de la troisième ligne de métro. Pour garantir des logements de qualité à ses futurs habitants, la municipalité s’engage à concilier sobriété, solidarité et qualité de vie
. Un défi d’autant plus grand que la file d’attente du logement social locatif s’allonge d’années en années. La ville ne comptait pas moins de 45 000 demandes en 2023.
Karine Traval-Michel, maire de Colomiers considère ces actions comme une opportunité de retravailler l’espace public
et d’éviter l’étalement urbain pour retrouver un espace public de qualité
.
Pour répondre à ces critères, le nouveau PLUI-H propose plusieurs alternatives :
- Revaloriser le parc de logements existant, grâce à des rénovations énergétiques.
- Promouvoir la mixité urbaine et sociale pour créer des quartiers diversifiés.
- Développer des infrastructures pour les modes de transport actifs, comme les chemins piétons et les pistes cyclables, afin de diminuer l’impact de l’empreinte carbone de la Métropole.
Préserver les espaces naturels
Autre défi, et pas des moindres, puisque la préservation des espaces naturels était la raison majeure dans l’annulation du précédent PLUI-H adopté en avril 2019. Le tribunal administratif de Toulouse avait jugé que ce document, au lieu de réduire, augmentait le rythme de consommation des espaces naturels, agricoles et forestiers (ENAF).
Pour répondre à cet enjeu, des études de densification ont été menées par chaque commune afin de diminuer l’impact sur les ENAF. Jean-Luc Moudenc soutient que ce nouveau plan d’urbanisme permettrait de protéger plus de 95 % de ces espaces.
L’objectif : pouvoir réduire la consommation des espaces naturels d’au moins 50 % par rapport à la consommation d’espaces observée au cours des dix dernières années précédant l’arrêt du Plui-H
.
Le PLUI-H, pour la période 2025-2035, prévoit de restreindre l’utilisation des espaces naturels à 468 hectares, répartis comme suit :
- 171 hectares seront consacrés à la construction de près de 10 000 logements,
- 85 hectares seront dédiés à l’accueil de près de 6 000 emplois,
- 59 hectares serviront à implanter des équipements publics nécessaires,
- 68 hectares seront réservés aux infrastructures routières et ferroviaires, en privilégiant les modes de transport actifs tels que les pistes cyclables et les chemins piétons.
Sanctuariser les espaces agricoles
En plus de ces objectifs, le futur PLUI-H prévoit de classer près de 9 500 hectares en zone naturelle, zones où toute construction sera interdite. Les espaces arborés et les zones vertes, reconnus pour leur biodiversité, leur valeur paysagère et leur rôle essentiel dans la lutte contre les îlots de chaleur urbains, bénéficient également d’une protection renforcée, avec environ 4 200 hectares de boisements classés et 800 hectares d’espaces verts protégés.
Un nouveau PLUI-H qui ne fait pas l’unanimité
Le nouveau PLUI-H reprend l’objectif instauré par le pacte pour l’habitat, texte instauré suite aux deux annulations du PLUI-H, soit un objectif de 7 000 logements par an. Cependant, selon l’étude réalisée par l’École supérieure des professions de l’immobilier (ESPI) et l’Union Nationale des Aménageurs (UNAM), cet objectif serait encore trop insuffisant :
”Un logement vacant n’est pas forcément un logement disponible. L’étude révèle l’inadaptation géographique entre l’offre de logements vacants et les besoins de logements des territoires.”
François Rieussec, président de l’UNAM
L’étude suggère que Toulouse Métropole devrait produire 10 000 logements par an jusqu’en 2030 pour éviter une crise du logement.
Les réserves émises par l’opposition
Le clan de Romain Cujives, du groupes des élus écologistes a évoqué au cours du Conseil de Métropole, certaines réserves, notamment le « manque d’ambition » du nouveau plan. Le document passerait à côté de nombreux enjeux et ne permettra pas à Toulouse de s’inscrire véritablement dans le temps long, et de faire de notre métropole un exemple remarqué et remarquable
.
Concernant la densification, Odile Maurin, conseillère métropolitaine de Toulouse, a aussi évoqué qu’il n’y avait pas suffisamment ”d’espaces de pleine terre, de balcons, de terrasses et d’espaces privés ouverts vers l’extérieur pour les futurs logements collectifs”
.
Marc Péré, maire de L’Union parle quant à lui d’un manque de sobriété énergétique et de préservation des espaces naturels.
En bref…
Le nouveau PLUI-H de Toulouse Métropole se présente comme une réponse aux défis de croissance démographique et de développement urbain durable. Prévu pour la période 2025-2035, il prévoit de remplacer le pacte pour l’habitat et de concilier construction de logements et protection des espaces naturels. Avec un objectif de 7 400 logements par an, principalement concentrés à Toulouse, Colomiers et Blagnac, la métropole entend se densifier tout en favorisant les transports durables et la mixité urbaine.