La Tour Occitanie a fait couler beaucoup d’encre depuis son intégration dans le projet Grand Matabiau. Ce programme neuf à Toulouse est loin de faire l’unanimité et doit rendre des comptes devant le tribunal administratif. La Compagnie de Phalsbourg, qui finance et qui va exploiter le gratte-ciel, avait pourtant prévu une inauguration en 2022. À l’heure actuelle, le projet est au point mort, à cause de la crise économique d’une part, mais aussi à la suite de tous les recours qui sont déposés contre lui. Faisons le point sur la situation de la Tour Occitanie.
Tour Occitanie : le projet est-il en suspens à Toulouse - vue sur le quartier Matabiau © IR Stone - shutterstock
Une bataille de longue haleine pour la Tour Occitanie
Le gratte-ciel de 150 mètres de haut, intégré dans le projet Grand Matabiau est confronté à de multiples attaques. L’association « Non au gratte-ciel de Toulouse », « les Amis de la Terre » et le DAL 31 se tenaient d'ailleurs le vendredi 3 septembre devant les portes du tribunal administratif de Toulouse pour dénoncer « 38 étages de luxe au pied de la gare Matabiau et pas un seul logement social ».
À titre de rappel, le projet de la Tour Occitanie a obtenu tous les accords nécessaires, dont celui de la CNPA (Commission Nationale du Patrimoine et de l’Architecture), un préalable obligatoire pour obtenir un permis de construire.
En 2018, un recours contentieux contre le projet avait déjà été déposé à l’encontre d’une délibération adoptée par Toulouse Métropole. Celle-ci autorisait la simplification des règles d’urbanisme imposées pour ce projet porté par la Compagnie de Phalsbourg.
Le point sur les logements sociaux
Le promoteur immobilier avait été complètement déchargé de ses obligations en ce qui concerne la construction de logements sociaux dans la tour. Au final, il a été décidé que les 35 % de logements qui auraient dû être réalisés peuvent être disséminés sur tout le projet urbain de Matabiau. Une décision qui n’a pas plu au collectif citoyen « Non au gratte-ciel de Toulouse ». Ce dernier regroupe des citoyens, les Amis de la Terre-Midi Pyrénées et le DAL 31 (Droit au logement Haute-Garonne).
De grosses économies pour le promoteur ?
Le président de l’association « Non au gratte-ciel de Toulouse », Richard Mébaoudj, a chiffré le montant de la ristourne issue de l’obligation de construire 35 logements sociaux et de la suppression dans le PLU entre 8 à 10 millions d’euros. Selon lui, la modification des règles d’urbanisme, dont le promoteur bénéficie aujourd’hui, peut être considérée comme un mauvais signal social. Il ajoute que la tour serait "réservée aux riches" et que la limitation des places pour les vélos serait un mauvais signal en termes de mobilité.
Un rejet des moyens développés par les opposants ?
Tour Occitanie : Rejet des moyens part les opposants - concept juridique © everything possible - shutterstock
Les conclusions du rapporteur publics ont été communiquées aux différentes parties avant le début de l'audience. Celui-ci intervient pour mieux éclairer la formation de jugement. Il expose son opinion sur les questions soulevées par la requête et la solution que celle-ci appelle.
Celui-ci a d'ailleurs rejeté les moyens qui ont été développées par les opposants au projet. Son argument repose sur le fait que « les obligations de logements sociaux sont respectées à l’échelle de l’opération TESO (Toulouse Euro Sud Ouest) » (sur un périmètre de 135 hectares aux abords de la gare).
Rappelons toutefois que le rapporteur public ne fait en aucun cas partie de la formation de jugement et ne peut donc pas participer à la prise de décision. En effet, ce sera aux juges qui statuent sur l’affaire de décider s’ils suivent ou non la proposition du rapporteur public, après l’audience. Toutefois, il est à noter que s’agissant de la justice administrative, le tribunal suit l’avis du rapporteur public dans l’immense majorité des cas. Le tribunal administratif donnera son avis sous un mois.
Le point sur le permis de construire
La tour Occitanie fait également l’objet d’un autre recours, contre le permis de construire. Ce dernier a été délivré en juillet 2019 et a été également attaqué. Pour cette procédure, il n’y a toujours pas de date fixée par le tribunal administratif. La procédure risque donc d’être encore plus longue que prévu, tout comme l’attente pour la réouverture du chantier. La Compagnie de Phalsbourg espère que les décisions juridiques lui seront favorables afin de remettre sur pied ce projet qui est estimé à 180 millions d’euros.
Les différentes oppositions au projet du premier gratte-ciel à Toulouse
Tour Occitanie : Quelles sont les dernières oppositions au projet ? - vue sur un gratte-ciel © Efman - shutterstock
La Tour Occitanie sera une espèce de « bâtiment-ville » installée sur un site d’environ 35 000 m², et aura 38 niveaux. Elle sera composée de plus de 100 logements, de 13 000 m² de bureaux, d’un hôtel 4 étoiles, de deux restaurants avec terrasses, de 600 m² de locaux SNCF et de 2 000 m² de commerces. Daniel Libeskind et Francis Cardete, deux architectes de renom, ont été choisis pour mener à bien cette construction.
Les critiques et les oppositions au projet fusent depuis déjà quelques années. Les associations concernées estiment que la Tour Occitanie n’est pas du tout acceptable, et ce, pour de multiples raisons.
Les aspects écologiques
La Tour Occitanie a toujours été décrite comme « verte ». Cependant, elle est accusée d’être ce que l’on appelle un non-sens écologique, car elle est potentiellement énergivore. Par ailleurs, la végétalisation de l’immeuble affiche des signes démontrant qu’elle ne sera pas viable dans le temps. Enfin, la Tour présenterait également un danger pour les oiseaux.
les aspects patrimoniaux et urbanistiques
Le projet de la Tour Occitanie pourrait avoir un impact négatif d’envergure sur le paysage urbain. En effet, il est inséré dans un environnement de constructions de hauteur plutôt modeste. Par ailleurs, le PLU est pointé du doigt à cause des modifications qui lui ont été apportées abusivement et opportunément.
L’argument concernant la densification semble abusif selon les associations plaignantes. La Tour ne comportera qu’un hôtel de luxe, des appartements de luxe, des commerces et des bureaux.
Comme la Tour jouxte deux sites classés au patrimoine mondial et aux monuments historiques, à savoir le Canal du Midi et la Gare de Toulouse Matabiau, elle risque de les dénaturer fortement.
Les aspects sociaux
Comme nous l’avons précisé un peu plus tôt, les opposants au projet ont également pointé l’absence de logements sociaux dans la tour. Elle pourrait alors engendrer un phénomène de gentrification.
Les aspects démocratiques
On peut aussi soulever l’absence de concertation publique spécifique pour ce projet. La modification du PLU a aussi été contestée à de nombreuses reprises. Pour terminer, les riverains sont particulièrement inquiets par rapport à l’ombrage du bâtiment et à sa réverbération qui pourraient priver certains quartiers d’ensoleillement pendant certaines heures de la journée.
Les aspects économiques
La possibilité d’un échec commercial laisse planer le doute sur l’avenir de la Tour Occitanie. Ces inquiétudes sont renforcées par la présence de nombreux immeubles de bureaux vacants dans l’agglomération toulousaine actuellement.
Les aspects structurels
Depuis les prémices du projet, la Tour Occitanie a été accusée d’être une menace pour le tunnel de la ligne A du métro à cause de ses fondations. Tisséo ingénierie et le promoteur ont déjà indiqué que tout était prévu et que la protection du tunnel sera assurée par deux parois moulées en béton.