Depuis 2016, Toulouse gagne environ 5 000 nouveaux habitants par an selon l'Insee, un chiffre qui lui vaudra bientôt sa place sur le podium des plus grandes villes de France. Un état de fait qui pousse la collectivité à repenser sa façon de construire pour les prochaines années.
Pour répondre à ces enjeux, une enquête publique sur le plan local d'urbanisme de l'agglomération toulousaine a démarré le 2 janvier dernier. Ce nouveau texte fait suite à l'annulation du précédent PLUI-H et a été validé au sein de Toulouse Métropole avant d'être à nouveau revu par les services de l'État, la Chambre d'agriculture et l'Autorité environnementale.
Élaboré pendant près de trois ans à l'échelle des 37 communes de la Métropole, le document détermine les principes d'organisation de l'habitat, les zones où la construction est possible, celles qu'il convient de préserver, ainsi que les modalités d'utilisation du sol.
Il sert de cadre réglementaire pour l'analyse des demandes d'autorisations d'urbanisme, comme les permis de construire ou les déclarations préalables de travaux.
Voici comment ce nouveau PLUI-H va articuler l'aménagement et la production de logements neufs à Toulouse pour les dix prochaines années.
Toulouse face au défi de l'étalement urbain
90 000. C'est le nombre d'habitants que doit accueillir Toulouse Métropole d'ici 2035... Un défi de taille quand on sait que la métropole doit aussi lutter contre l'étalement urbain. Selon un récent bilan de l'AUT, près de 20 000 hectares d'espaces naturels, agricoles et forestiers auraient été consommés entre 2011 et 2021 dans l'aire urbaine de Toulouse, soit l'équivalent de deux fois la ville de Castres.
Toulouse Métropole doit se préparer à accueillir environ 90 000 nouveaux habitants sur la période 2025-2035
, confie l’adjointe en charge de l’urbanisme. Il faudra donc être en capacité de produire 72 000 logements, de répondre aux besoins des entreprises pour l’accueil de 51 000 nouveaux emplois, ainsi que les équipements publics et infrastructures liés.
Le document tente de résoudre un casse-tête toulousain de longue date : comment accueillir une population toujours plus nombreuse sans étendre indéfiniment la ville sur les terres agricoles et naturelles ? Il s'agit de concilier croissance démographique et sobriété foncière, en construisant davantage... Mais mieux, et surtout sans empiéter sur l'espace disponible comme par le passé.
La métropole toulousaine se retrouve dans une position inédite : elle est la première en France à devoir repenser ses règles d'urbanisme à l'aune des exigences de la loi Climat et Résilience. En toile de fond, l'annulation de l'ancien PLUIH, qui impose aujourd'hui à Toulouse Métropole de repartir de zéro, avec une contrainte majeure : réduire drastiquement la consommation des espaces naturels, agricoles et forestiers. Adoptée en 2021, cette loi fixe un cap clair vers une urbanisation plus sobre, et transforme en profondeur la manière dont les collectivités doivent planifier leur développement territorial.
Nous devons construire en limitant l’étalement urbain
souligne Annette Laigneau. Il y a de nouvelles réglementations qui révolutionnent la façon de construire la ville : nous devons construire la ville sur la ville, favoriser le renouvellement urbain.
Construire 7 500 logements en moyenne
Pour accueillir les quelques 90 000 habitants supplémentaires, Toulouse Métropole doit adapter sa politique de logement. Un cap ambitieux qui suppose une réponse forte. Pour accompagner cette croissance, la métropole s'est fixé un objectif clair : produire en moyenne 7 500 logements par an.
Ce volume de construction a fait l'objet d'une programmation territorialisée, dévoilée en juin dernier. Chaque commune de l'agglomération s'est ainsi vu attribuer une part de l'effort collectif, dans une logique de répartition équilibrée du développement urbain sur l'ensemble du territoire :
- 72 % des logements attendus seront construits à Toulouse, Colomiers et Blagnac.
- 6 % des logements attendus seront construits à Balma et Tournefeuille.
- 14 % des logements seront construits dans 13 communes relais : Cugnaux, Saint-Orens, L'Union, Saint-Jean, Aucamville, Pibrac, Cornebarrieu, Beauzelle, Saint-Jory, Quint-Fonsegrives, Fenouillet et Montrabé
- 8 % des logements seront construits dans les communes suivantes : Castelginest, Launaguet, Aussonne, Saint-Alban, Bruguières, Mondonville, Gratentour, Seilh, Gagnac-sur-Garonne, Fonbeauzard, Brax, Lespinasse, Drémil-Lafarge, Flourens, Mons, Beaupuy, Aigrefeuille, Pin-Balma et Mondouzil.
Construire la ville sur elle-même : un impératif écologique
Face aux exigences environnementales et à la raréfaction du foncier, la stratégie est claire : bâtir là où la ville existe déjà. Près de 90 % de nouveaux logements prévus par Toulouse Métropole seront réalisés dans des zones déjà urbanisées. Une orientation assumée, appuyée par une vaste étude de densification menée commune par commune, afin de limiter l'emprise sur les terres agricoles et les milieux naturels.
À Toulouse et Colomiers, cet effort de construction se concentrera en grande partie le long des 27 kilomètres de la future ligne C du métro, axe structurant du territoire. Ce choix d'urbanisation autour des transports en commun répond aussi aux ambitions de la loi Climat et Résilience, qui vise le zéro artificialisation nette (ZAN) d'ici 2050.
Autrement dit, les communes vont devoir, dans un avenir proche, réduire fortement leur consommation d'espaces naturels pour construire. Dans ce contexte, la ligne C devient une réelle opportunité de repenser la ville sur elle-même, en réinvestissant les friches, en densifiant intelligemment les quartiers existants et en rapprochant logements, services et mobilités.
Plus de logements sociaux
Alors que certaines communes ne respectent pas la loi en matière de production de logements sociaux, le document souhaite s'appuyer plus intensément sur ce volet.
À l'échelle métropolitaine, et pour chaque commune de plus de 3 000 habitants (soit 30 communes sur 37), nous fixons un objectif d'au moins 60 % de logements abordables
indique Karine Traval-Michelet, maire de Colomiers et vice-présidente de Toulouse Métropole.
Pour ce faire, le nouveau dispositif renforce l'exigence de production de logements sociaux en abaissant les seuils d'application. Désormais, tout projet immobilier dans l'agglomération devra intégrer 35 % de logements sociaux, un taux obligatoire dans les 37 communes de Toulouse Métropole.
Dans le détail, 27 communes ont choisi d'appliquer cette règle à toute opération dépassant 500 m² de surface de plancher. Les villes de Toulouse, Blagnac et Colomiers, quant à elles, ont fixé la barre plus haut : le seuil ne s'appliquera qu'aux projets de plus de 1 000 m². Une façon d'ajuster l'exigence en fonction de la densité et du tissu urbain local.
L'objectif sur ces communes est de retrouver des logements locatifs sociaux sur des opérations de taille plus réduite. À l'origine, l'obligation de produire des logements sociaux était déclenchée dès lors que les projets immobiliers représentaient jusqu'à 1 500 ou 2 000 m². Ainsi, la majorité des opérations seront soumises à cette obligation.
Des terres agricoles sanctuarisées
Selon le texte, près de 9 500 hectares sont classés en zone naturelle, zones où les constructions sont par conséquent interdites. En parallèle, les espaces verts et arborés seront aussi fortement protégés, avec environ 4 200 hectares d'espaces boisés classés et 800 hectares d'espaces verts protégés.
En tout, près de 11 900 hectares seront sanctuarisés pour les activités agricoles, soit un quart de la surface de la métropole.
28 000 nouveaux logements le long de la ligne C
Ces derniers mois, Anette Laigneau, adjointe à l'urbanisme, a levé le voile sur la stratégie menée autour de la troisième ligne de métro toulousaine. Six grands secteurs, chacun articulé autour de trois stations, ont été ciblés comme leviers de transformation urbaine. Des concours ont été lancés pour sélectionner des groupements disciplinaires réunissant urbanistes, paysagistes et bureaux d'étude, avec un objectif clair : imaginer un développement urbain cohérent, durable et connecté aux mobilités.
L'idée est de bâtir une vision à l'échelle métropolitaine : faire de ces pôles un moteur de renouvellement urbain, tout en encourageant l'usage des transports en commun, notamment la future ligne C. Une approche qui vise aussi à rééquilibrer le territoire, en concentrant la croissance dans des zones déjà desservies, et ainsi éviter l'étalement urbain.
Selon l'adjointe, près de 90 % des futurs logements seront implantés à proximité directe d'un réseau de transports en commun, dont une large majorité autour de la future ligne C. À terme, cela représenterait environ 28 000 logements. Une stratégie assumée qui permettrait, selon la Métropole, de préserver plus de 95 % des espaces naturels, agricoles et forestiers (ENAF), et de répondre à l'un des grands objectifs fixés par le PADD (Projet d'Aménagement et de Développement Durable) : réduire de moitié la consommation d'ENAF par rapport à la décennie précédente.